Serions-nous génétiquement « chialeux »?
Je lisais récemment que le cerveau serait la partie du corps humain ayant le moins évolué au cours des dernières centaines de milliers d’années. En fait, nous aurions encore aujourd’hui le cerveau d’un chasseur-cueilleur d’il y a 200 à 300 milles ans.
Ça m’a fait réfléchir : ça pensait comment un chasseur-cueilleur? C’était quoi le réflexe d’un chasseur-cueilleur devant les différents événements de la vie de l’époque?
D’après moi, ceux qui ont survécu assez longtemps pour transférer leurs gênes devaient surtout exceller dans l’art de survivre. Il me semble que lorsqu’on vit dans un environnement extrêmement dangereux, peuplé de créatures plus grosses, plus fortes, plus rapides et mieux armées, il faut être constamment à l’affût de ce qui peut aller mal, se méfier de tout, prendre tout mal à priori, de prêter au voisin les pires intentions.
Ceux-là, experts dans l’art de voir venir le trouble, ont dû survivre. Ils ne se posaient pas de questions existentielles et présumaient que la crinière blonde qui se pointait ne présageait rien de bon. Ils étaient les premiers en haut de l’arbre.
Les hésitants, les bonnes natures, les philosophes, ceux qui refusaient l’AMALGAME, qui donnaient le bénéfice du doute à la crinière (peut-être est-ce un bon lion végétarien?) sont morts au bas de l’arbre et n’ont pas eu de progéniture. Nous sommes donc les descendants des autres : les gens pleins de préjugés, habiles à « spotter le trouble » et à réagir en conséquence.
D’après mon analyse, être attentif aux bonnes choses, apprécier ce qui va bien, ne donne pas grand chose dans la brousse. C’est pourquoi, notre cerveau semble beaucoup plus intéressé par ce qui va mal ou ce qui risque d’aller mal. Aucun avantage à porter plus d’attention qu’il ne faut à ce qui va bien. Ça pourrait peut-être expliquer pourquoi, quand on entre dans une salle de repos de nos organisations et qu’un groupe de nos employés parlent de l’organisation, c’est rarement, sinon jamais en bien. Pourquoi cet acharnement à ne voir que ce qui va mal, ce qui échoue? Probablement, question de gènes chasseurs-cueilleurs!
Pourquoi autant de « chialage » au travail, dans les journaux, dans les médias? Pourquoi cette fascination pour la misère? Pourquoi si peu d’accent sur les bonnes nouvelles? La réponse : les bonnes affaires qui arrivent aux autres, ça nous ennuie. Je suis toujours éberlué par ce besoin de participer aux grands événements tragiques. Les églises bondées lors de malheurs médiatisés, les fleurs, les toutous pour les victimes du jet set. Cet appétit pour le malheur et le morbide doit nous venir de là!
Dans de telles circonstances, considérant ces réflexes de chasseurs-cueilleurs, imaginez-vous le défi que représente le fait de chercher à reconnaître les bons coups, les bons résultats ou pire encore, le bon travail au jour le jour. C’est carrément contre nature! C’est pourquoi il n’est pas exagéré de dire que le plus difficile dans l’implantation d’une culture de reconnaissance dans nos organisations, c’est d’amener les gens À VOIR CE QUI VA BIEN ET À APPRÉCIER alors que notre nature semble faite pour le contraire.
Lorsqu’on demande aux employés ce qu’ils veulent le plus comme reconnaissance ils répondent invariablement : « DITES-LE NOUS QUAND ON FAIT DU BON TRAVAIL ». Pour être en mesure de ce faire, encore faut-il être capable de constater que du bon travail se fait!
Bref, il s’agit d’évoluer de 250 000 ans
André Savard, B.A., LL.L., CRHA